Forma Fantasma et l'autarcie - ou si on faisait tout nous-mêmes ?

L'autarcie? L'autonomie ? La simplicité volontaire pour atteindre l'indépendance. Ou un délire, quand cela donne l'Albanie stalinienne. Bref, quelque chose entre Gandhi et le diable. Un peu dur à décider. Donc, potager, et austérité. La tentation n'est pas neuve en Europe (pensez à Saint François d'Assise).

Elle nous vient parfois d'un dégoût du luxe agressif. Un refus de la société de consommation qui est, lui-même, et c'est son paradoxe, un luxe qu'on ne peut se permettre que dans les temps gras. Et elle arrive, parfois, comme une nécessité. Faute de grives, on mange des merles. Faute de tout, on vit de peu. L'Europe en est soudain là. L'autarcie concerne le chômeur en fin de droits, le petit paysan, le jeune qui n'a rien et ne voit rien devant lui, autant que le tenant de la démondialisation et le partisan de l'alter-mondialisme. Comment vivre de peu? Comment générer ce peu? Trouver comment ne pas dépendre devient une nécessité quand on ne reçoit plus rien. Les italiens de Studio Forma Fantasma, dont nous avons déjà signalé le travail de recherche, rare encore dans le monde du design, sur les questions pourtant cruciales du mode et des rapports de production, ont imaginé comment une petite communauté pourrait subvenir à ses propres besoins, et, par exemple, se doter d'ustensiles aussi nécessaires à la vie que des pots, des assiettes, en utilisant ce qu'elle produit déjà.

Il y a trente ans, la collection Autarchia aurait pu passer pour baba cool. Il y a vingt, on l'aurait plutôt vue comme participant du fantasme Côté Sud d'un beau dimanche à la campagne (il y a de cela ici, bien sûr, jusqu'à la participation du boulanger Poilâne). Aujourd'hui, signe des temps, elle rappelle plutôt l'austérité du style Quaker. Un style protestant, donc. Car il proteste. A sa manière douce. Contre ce que sont devenus les temps. 

Christian Perrot

http://www.formafantasma.com