Grünt me up baby avec deux jours de hip hop furieux, mais pas que, à la Grande Halle

Depuis 4 ans, le Grünt Festival cherche a être la vitrine live de tout l’état d’esprit du Media Grünt. Comme le média, le festival Grünt se met au service des artistes et du public. Une programmation qui se veut défricheuse, reflet d’une exigence éditoriale, et qui cherche à mettre en avant une nouvelle génération d’artistes en leur offrant un espace d’expression digne des plus grands festivals, mais sans additionner les têtes d’affiches. Rendez-vous les 24 & 25/10

Pour cette 4e édition, le Grünt Festival prolonge ses engagements envers les artistes. Le Grünt festival c’est le festival des premières fois, où certains artistes vont défendre leur premier live sans hiérarchie de scène principale ou secondaire - tout le monde joue devant le même public en alterné. Mais le Grünt festival c’est aussi le festival de la fidélité, en prolongeant année après année une histoire collective qui s’écrit avec des artistes depuis plus d’une décennie, mais qui sont toujours représentés au line up du festival. 

Enfin le Grünt festival c’est celui du public, pensé pour lui et qui n’existe que grâce à lui, une communauté soudée qui permet de voir plus grand chaque année, et qui oblige aussi à penser une programmation à la hauteur des exigences.

Des premiers freestyles en appartement qui ont favorisé l'émergence de futures têtes d'affiches du rap francophone (Nekfeu, Alpha Wann, PLK, Georgio, Caballero et JeanJass...) il y a plus de dix ans à la troisième édition du Grünt Festival qui a accueilli plus de 15 000 personnes à Bobigny en 2024, en passant par les sessions live "Grünt d'or", les longs entretiens, les documentaires à Paris, Lagos ou Casablanca et le lancement de Grünt Radio en 2020, Grünt est un témoin majeur – et un acteur à part entière – de l’évolution du rap en français. Jamais nostalgique, Grünt a naturellement accompagné ces dernières années l’avènement de la nouvelle vague du rap francophone (dont de nombreux représentants ont grandi et appris avec les freestyles Grünt), donnant les clés de la maison à La Fève, Wallace Cleaver, Rounhaa, Luther ou NeS.

VENDREDI :
JeanJass, Zamdane, Mairo, H Jeunecrack, Ptite Soeur, Sherifflazone, Jungle Jack, Gen, Absolem, Kabbsky, Pasxlim, Akissi

SAMEDI :
Foufoune Palace ( Luidji, Tuerie ), Lesram, TH, Yvnnis, Asinine, Ino Casablanca, Jeune Morty, Arone, Ajna, Gal, Mandyspie, Douze Deluge, Toothpick, 32 x Encore une autre, Tisma.

-> En savoir plus en direct sur le site de Grünt, ici où vous trouverez une longue série d’artistes en fresstyle vidéo.

Ino Casablanca

Pour faire bonne mesure, on vous présente deux participants : Ino Casablanca et Ptite Sœur. Le premier avec un groove méditerranéen, le second plutôt hardcore - de manière inattendue.

« 2K25 je suis le rookie, j’ai à peine bougé le petit doigt ».
Une punchline qui dit tout : à peine lancé, Ino Casablanca a déjà su marquer les esprits. D’origine marocaine, né en Espagne et installé en France depuis l’âge de 12 ans, l’artiste complet — auteur, compositeur et producteur — s’impose comme une voix singulière.

Aujourd’hui, il passe à l’étape suivante. « Ino Casa qui l’arrête ? j’ai des nouveaux flows qui arrivent » lâche-t-il dans “Dima Rave”, premier extrait d’EXTASIA. Comme un signal de départ : Ino change de vitesse, explore d’autres terrains et ouvre sa musique à de nouvelles couleurs.

En 2013-2014, en France, Ino Casablanca découvre le rap et surtout la trap, sous-genre alors au sommet. Il écrit ses premiers textes dans l’ombre, bricole ses premières prods, teste sans se montrer. Les musiques nord-africaines de son enfance, il les laisse de côté un temps — avant d’y revenir plus tard, avec la distance nécessaire pour les réinventer. Dans le même temps, il garde un œil sur l’Espagne, où l’émergence de Rosalía ou C. Tangana confirme qu’on peut transformer des traditions locales en langage moderne et global. C’est cet esprit qu’il insuffle dans Tamara, premier projet qui marque aussi le début de sa collaboration avec le label LCS Recordz, fondé par Le Chroniqueur Sale (observateur sans concession de l’actualité rap et beatmaker). Son approche reste exigeante mais spontanée, refusant la démonstration gratuite. Cette singularité place aujourd’hui Ino Casablanca parmi cette génération d’artistes qui dessine la sono mondiale de demain.

EXTASIA concrétise cette vision en tissant des influences qui dialoguent entre elles. Intuitive et directe, son écriture capte la vraie vie, portée par un flow flegmatique qui dit tout sans hausser le ton. Si Ino compose ses morceaux, il s’est entouré pour ce projet d’OSO Mexico (guitare, basse) et Théo Baldy (claviers), venus rejouer certaines parties et donner une dimension plus organique à l’ensemble. Le raï s’y réinvente dans une esthétique synthétique et digitale (“Bissap du 20ème”, “Paramour”), tandis que les rythmiques caribéennes, latines et maghrébines, déjà présentes sur Tamara, trouvent ici de nouveaux prolongements (“Dima Rave”, “Flocage”, “Clubmaster”, “Blicky”, “Extaz”). Certains morceaux s’imposent comme des pivots : “Moula Solitude”, tube irrésistible de kompa moderne avec le rappeur marocain Draganov ; ou encore “Kitlé”, qui commence en ballade zouk avant de s’embraser dans un final de synthé flamboyant, en écho à cette même énergie kompa. Et pour rompre avec cette lumière festive, “Dima Rave Encore” ouvre une parenthèse plus sombre.

L’extase, pour Ino Casablanca, n’a rien d’ésotérique : elle peut surgir d’une simple fête improvisée sur un parking avec des amis et une sono généreuse. EXTASIA traduit cette quête d’instantanéité, cette envie de provoquer des vibrations pour atténuer son désenchantement, qu’il confesse sans détour.

Ino Casablanca - Extasia - LCS Recordz

Ptite Sœur, neophron & FEMTOGO - Pretty Dollcorpse - SFN

Là, attention, j’emploie peu ce vocable, mais ce truc change le game avec des artistes qui parlent de coming out et d’enfance battue pour envoyer un vrai truc fiévreux, abouti et véloce. Un fan ébloui le raconte ainsi : “C'est deep smr, c'est cru de zinzin mais c'est sincère. Soeur joue grv avec sa voix et ses flows, c'est frais. Femtogo rap tjr aussi bien, il chante pas mal aussi. Mais le vrai interêt du projet imo se trouve dans son propos. Les deux comparses se livrent beaucoup, nombreux sont ceux qui se reconnaitront dans les paroles de l'un comme de l'autre. Bref masterclass, le duo Ptite Soeur/ Femtogo fonctionne très bien pour pleins de raisons différentes.” Avec la prod de neophron, on circule de compo rock en guitares sèches, de beats secs en orgue soul qui emporte la mise. Si vous cherchez du hip hop qui parle au présent de la France de 2025, ne cherchez plus, c’est là. En vrai et en grand !

Jean-Pierre Simard, le 14/10/2025
Grünt Festival à la Grande Halle de la Villette 24 & 25/10
Ino Casablanca - Extasia - LCS Recordz
Ptite Sœur, neophron & FEMTOGO - SFN