Quatre heures pour la marche des enfants fleurs,  album de week-end

Comme il n’existe qu’un Philippe Thieyre, on va dire qu’il a fait découvrir ici le psychédélisme avec ses livres et ses conseils avisés quand il était libraire à Parallèles, autant que cette compile va vous faire découvrir en un/e après-midi, sous influence ou pas, pluvieuse ou assommée de soleil automnal, le panorama de l’idiome tel que dévoilé par la production US de 1967. Grâce (Slick!) lui en sera rendue et l’album s’intitule “Marche des enfants fleurs, les sons américains de 67”.

Strawberry Alarm Clock version 2022

Gérard Larcher, dit double gras, vient d’être réélu à la tête du Sénat, sûrement pour une autre décennie d’andouillettes grillées au barbecue. Quoi d’autre hein ? Pascal Prout répand encore son fumet douteux et invite toujours le Nain sectaire pour leur cuisine au beurre. 2023 est un sacré bad trip et les champignons du bord des champs ( Mangez-moi, mangez-vous… ) n’y feront rien… Depuis le petit Nicolas, certains vouent une haine tenace/ jalousie sans pareille aux radieuses 60’s et l’idée d’un monde ouvert qui refusa un temps de passer sa vie à consommer. Voici donc, en quatre heures et 3 cd, le spectre de ces envies/idées, délires/massacres et merveilles d’ailleurs et d’Haight-Ashbury aussi. Assez radical dans le son comme dans le propos, cette compile est le versant US d’une autre production de Cherry Red Records en deux fois trois cd : Too Much Sun Will Burn, The Britsh Psychedelic Sounds of 1967 . Quoi de mieux que le Buffalo Springfield comme cliché d’ouverture avec un groupe qui vient de se perdre dans un sacré kaléidoscope; matez les yeux de Neil Young . Comme ils l’affirmaient eux-mêmes “Nowadays Clancy Can't Even Sing”.

 

Commençant par un hymne fuzzy aux harmonies vocales lunatiques du Peanut Butter Conspiracy, March of the Flower Children accorde une attention toute particulière aux musiciens moins connus de la promotion 67. On y trouve des morceaux groovy et mystiques des Spike Drivers de Detroit (avec un jeune Ted Lucas, qui a ensuite réalisé sous son propre nom l'un des plus célèbres albums de folk psychédélique des années 70), du garage baroque riche en cuivres de l'obscur groupe de Cleveland, Mississippi sur "Can't Put a Thing Over Me", la pop bonbon des Peppermint Trolley Company sur "It's a Lazy Summer Day", et des morceaux d'autres groupes peu appréciés comme Lemon Fog, The Balloon Farm, et Jackson Investment Co.

Il y a également des entrées de certains des plus grands noms de 1967 : le Grateful Dead, les Byrds, les Monkees, et Love, ainsi que des exemples intéressants de pop stars établies, plus directes, qui ont essayé le nouveau style psychédélique pour la taille. Le chanteur de Bubblegum Tommy Roe explore les confins de son esprit sur la pop hippie de chambre "Paisley Dreams", les Everly Brothers se mettent à la page sur "Mary Jane" et les sains surf rockers Jan & Dean interprètent l'hymne flower power sautillant "Love and Hate". Pour contrebalancer tous les sentiments d'encens et de menthe poivrée, March of the Flower Children comprend de nombreux morceaux des artistes les plus hargneux et acariâtres de l'époque, avec des perturbations bruyantes du Velvet Underground, de Captain Beefheart et des Mothers of Invention.

Kim Fowley

Avec 85 titres et près de quatre heures de son, March of the Flower Children illumine tout le spectre du psychédélisme de 1967, qu'il soit branché, allumé ou éteint. Et va vous permettre, un casque sur les oreilles, ou au milieu des coussins du salon de passer un week-end à envisager autre chose. Bonus beat de la compile, vous aurez forcément envie, ensuite, d’en savoir plus et d’(entr)ouvrir un peu les portes de vos perceptions. Couché Bruno le Maire ! C’est avec Aldous Huxley via/ ou pas les Doors qu’on passe le week-end ici.

Jean-Pierre Simard,
V.A. - March of The Flower Children : The American Sounds Of 1967 ( 3cd boxset) - Cherry Red Records