Oko Ebombo – voix magistrale et son d’aujourd’hui entre jazz, funk, rumba et downtempo

Artiste multidisciplinaire et être hybride, Oko enchaine les mues sans jamais se plier à la règle. Il est en voie de créer un nouvel ordre cosmique multi-disciplinaire entre danseur, vidéaste, acteur, performeur, poète, chanteur et musicien. Il ramait depuis longtemps avec son posse 19 quand Il a croisé le regretté Philippe Zdar qui l’a aidé à mettre en forme son et univers. Et le résultat dégage de nouvelles perspectives au chant d’ici. Comme une union réussie entre chant et électronique. Imposant album !

Après Nalingi Yo, le single de l’an passé, l’album se dévoile enfin qui accroche à la première écoute, tant on y retrouve ce qui faisait l’intérêt de la scène downtempo des 90’s avec un nouveau mix plus jazzy que DJ Food et plus rumba que les premiers essais de Zazou-Bikaye des 80’s. On colle souvent sur le dos d’Oko Ebombo l’image d’un black Bowie pour la versatilité du son ( c’était même l’accroche chez ID de ses premiers essais en 2016) , mais il faut pousser plus loin, car il possède bien un son et un univers qui lui sont propres et forment un kaléidoscope qui ne se dévoile qu’au fil des écoutes sous la forme revendiquée d’une fanfare pour l’homme du commun. Preuve qu’il se situe du côté des chercheurs de son, il a même invité Bonnie Banane sur deux titres. Et de revenir l’idée de laisser tourner l’album en continu pour distinguer les nuances au fil de la journée, pour sentir sa richesse, comme sa variété : tantôt on va accrocher sur un climat jazzy, ailleurs ce sera la voix qui envoûte sur les titres longs comme Eagle Landing ou Celebrate, l’avant-dernier titre de l’album.

C’est bien une musique urbaine loin des clichés, qui joue l’Afrique, comme New-York ou Paris sans en faire un cirque, mais en sachant à quoi elle réfère, sans jamais appuyer, mais toujours avec un juste ton et une voix qui ne laisse jamais indifférent. Pour Free Emotion, Oko Ebombo s’est entouré de musiciens français et américains, qui ont aussi bien joué avec Arthur Russell (le percussionniste Mustafa Khaliq Ahmed) et Roy Hargrove (le saxophoniste Myron Walden) que pour Nekfeu (Loubenski, Monomite). 

On sent bien ici l’urbanité de la nuit, celle d’avant le COVID, une nuit sensible, ouverte, qui se joue et se rejoue, chaque fois différente, mais un peu semblable, avec un rappel au passé décomposé, mais tout aussi recomposé dans ce nouveau mix , inaperçu jusqu’ici, d’un artiste trouvant la liaison entre ce qui se jouait avant et se déjoue maintenant. Un artiste à suivre, un album important. Une nouvelle voix, ô combien touchante.

Jean-Pierre Simard le 23/10/2023
Oko Ebombo - Free Emotion - Mokili