Combat Rock + The People’s Hall : The Clash en version 2022

Alors que The Clash s'apprête à enregistrer son cinquième album fin 1981, les coutures des Perfecto commencent à craquer. Combat Rock sera le dernier album avec le guitariste, chanteur, auteur-compositeur et cofondateur Mick Jones (licencié en septembre 1983), un an et demi après la sortie du LP. Joe Strummer et Paul Simonon ont continué pour un mauvais Cut the Crap et la dissolution de 1986. Retour… 

 
 

Mais même avec Combat Rock en boîte et prêt à être lancé, il y a eu des problèmes : Strummer disparaît, la spirale de la toxicomanie du batteur Topper Headon l'amène à quitter le groupe et les disputes qui découlent de l'album Sandinista ! de 1980 s'intensifient. Le succès commercial massif de l'album et une place en première partie de la tournée des Who n'ont pas pu ralentir la course à l'inévitable.

Une tentative antérieure de faire un autre album multi-disques - le double LP Rat Patrol From Fort Bragg - finit par échouer, et Glyn Johns est appelé à coproduire un projet révisé et allégé qui, pour l'essentiel, freine les changements de genre de Sandinista ! et tente de ramener les Clash sur leur voie punk. Les deux CD Combat Rock / The People's Hall, publiés à l'occasion du 40e anniversaire de Combat Rock, ne recréent pas Rat Patrol From Fort Bragg et n'essaient même pas de présenter Combat Rock sous un jour nouveau. Il présente plutôt l'album original ainsi qu'un disque de chutes et de faces B, dont certaines inédites, datant de l'époque.

 
 

Avant que le projet ne soit transféré aux Electric Lady Studios de New York, le groupe a enregistré quelques morceaux au People's Hall, un studio créé par le groupe. Une douzaine de chansons issues de ces sessions ne réécrit pas l'histoire : les titres qui ont permis aux Clash de réaliser leur meilleur score sont les plus aboutis et les plus évidents.

 
 

L'album original de 12 chansons a connu des variations d'acceptation depuis sa sortie en 1982. D'abord mis de côté parce qu'il n'avait pas l'ambition de ses prédécesseurs Sandinista ! et London Calling, il est aujourd'hui apprécié pour ces mêmes qualités. Les meilleures chansons se trouvent sur la face 1 : "Should I Stay or Should I Go", "Rock the Casbah" et "Straight to Hell", le verso étant réservé à des numéros plus expérimentaux comme "Overpowered by Funk" et "Ghetto Defendant", un morceau d'Allen Ginsberg.

Associée à "Futura 2000" de The People's Hall (un mélange précoce du single "The Escapades of Futura 2000" enregistré avec le graffeur Futura 2000), à la face B de Mikey Dread "Radio One" et à une version de "Know Your Rights" enregistrée au studio mobile des Rolling Stones, la seconde moitié de Combat Rock donne une assez bonne idée de la direction que prenait le projet de deux LP de Jones avant qu'il ne soit réduit.

Les chutes et les restes de "Idle in Kangaroo Court", "The Fulham Connection" et l'instrumental "He Who Dares or Is Tired" sont également des indicateurs de l'expansion de Fort Bragg, à défaut d'être des ajouts essentiels au catalogue du groupe. Quarante ans plus tard, Combat Rock sonne toujours comme les Clash en phase de reconstruction après l’éparpillement de Sandinista ! et le single proto-rap "This Is Radio Clash" (une version révisée apparaît ici sous le titre simplifié "Radio Clash"). Ils n'ont jamais atteint la ligne d'arrivée, s'éteignant au milieu d'egos meurtris, d'animosité et de trop d'opinions opposées tournant autour du syphon Sandinista !. Leur dernière essai grandiose se terminant quand même en beauté.

Si vous ne lisez que ceci, vous passez à côté de ce qui fait le sel de l’histoire (pour la maison de disques qui voulait vendre son groupe de rock et pas des aventuriers du son) … Car Rat Patrol a servi à la fois de matrice au premier album de B.A.D. et de matière à excuses pour Strummer qui l’a rejoint sur un futur album, lui expliquant après coup, qu’il avait raison de pousser le son dans cette direction. (NDLR)

Jean-Pierre Simard le 23/05/2022
The Clash - Combat Rock + The People’s Hall - Columbia/Legacy