migrants à Sète : pour un démantèlement du centre de rétention administratif

mardi 12 juin


Lundi 11 juin

face au CENTRE DE RÉTENTION ADMINISTRATIF de Sète, à midi, libération des enfermés et démantèlement !

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Ça y est les citoyens sont au courant de l’existence des CRA
et ils disent
et nous disons
nous ne consentons pas

Monsieur le Préfet, monsieur le ministre, monsieur le président,
tous vos spécialistes en communication ne suffiront pas
nous sommes les spécialistes
nous voyons chaque jour la détresse et la violence à l’intérieur des CRA
nous faisons au jour le jour notre propre expertise
et le constat est clair

nous ne consentons pas

nous ne cautionnons pas vos prisons cachées et vos séquestrations masquées

maintenant que nous, citoyens, le savons
maintenant que nous avons mis des mots dessus
maintenant que nous avons remis les mots justes
les mots qui correspondent aux situations vécues et non aux intérêts politiciens du gouvernement

maintenant que notre regard s’est découvert
que nous disons séquestration
que nous disons pire que prison
injustice
torture
morts
suicides
scarifications
pendaisons

nous ne tolérerons pas un jour de plus l’existence des CRA
nous entrons aujourd’hui officiellement
dans le premier jour de démantèlement des CRA en France

nous exigeons que soient libéré Moussa Kanté et Aly Sidibé
puis tous les mineurs séquestrés au CRA aujourd’hui
ainsi que tous les grévistes de la faim.

nous voulons entrer en dialogue avec la Préfecture et le gouvernement pour établir un calendrier
de démantèlement des CRA
puis entamer la construction de centres d’entraide, d’accueil, d’hospitalité, d’hébergement,
d’orientation et d’apprentissage, inconditionnels

nous choisissons d’accueillir et d’aider

Mettons fin au bégaiement épileptique de la violence

Libérons Moussa Kanté
Libérons Aly Sidibé
Libérons les trois mineurs enfermés aujourd’hui
et les trois grévistes de la faim

Fermons les Centres de Rétention Administrative.

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Photo © Ernest Puerta


Dimanche 10 juin 2018

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À Sète, il faut quand même le raconter, la lutte contre le CRA du quai Maillol a commencé il y a plusieurs années, au sein d'un collectif qui n'a jamais cessé de rendre visite aux étrangers enfermés derrière les barbelés. Ils ne sont pas nombreux, à l'intérieur du Réseau Éducation Sans Frontières de Sète et du bassin de Thau, mais ils sont vaillants. Comme Kirikou, l'enfant d'Afrique du film de Michel Ocelot.

Alors au fil des ans, ce sont des centaines de rencontres au parloir, des témoignages qu'on n'oublie pas une fois qu'on les a lus. Des textes où nos frères migrants racontent le malheur d'être exilés et sans papiers dans l'Europe forteresse. Eux, ce sont les nouveaux parias d'un monde qui devient incapable d'accueillir, c'est pour eux qu'on se bat. Et avec eux, il y a ces volontaires de RESF qui n'ont jamais cessé de leur rendre visite, de recueillir leurs paroles et de les diffuser à l'intérieur d'un petit groupe de justes que nous sommes fiers d'avoir rallié cette année.

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Et l''an dernier sont arrivés deux énergumènes. On les appelle comme ça parce qu'on les aime. Pierre Mounir est circassien, comédien et il appartient aux justes de RESF. Mathieu Gabard est poète de rue à Montpellier, un solitaire solidaire qui est venu, pendant l'été 2017, recueillir la parole des enfermés du CRA pour la crier dans les rues de Sète. Sète la maudite puisque depuis toutes ces années, on y pratique l'emprisonnement systématique des étrangers. Avec Pierre et Mathieu, les « CRAieurs de rues » étaient nés et c'était une vraie naissance, le commencement d'une aventure aussi. Un jour de mars 2018, les deux énergumènes ont recommencé à crier ces paroles qui racontent le malheur. On était une dizaine à être venus les écouter. Et c'est ce jour là qu'on a eu l'idée des affiches. « ExCRAdition générale ! » était né.

Fin mars, il y a eu l'apéro anti-CRA. C'était un dimanche à midi, au soleil, en plein milieu du marché aux puces. On a parlé des affichages, des témoignages que recueillait RESF dont il fallait faire quelque chose, et puis un philosophe a dit, je m'en souviens, « que si notre premier objectif était de libérer la parole des enfermés, en l'affichant sur les murs avec les écrits d'écrivains solidaires, notre principal objectif devait être de libérer les étrangers enfermés. » Et il avait raison, Michel Negrell. On ne veut pas oublier ses paroles et on commence demain.

Je veux dire que demain, lundi 11 juin à midi, on se rassemble face au CRA pour libérer Moussa Kanté et Aly Sédébé, qui n'a que 16 ans. C'est par eux qu'on commence. Et pourquoi eux ? Pourquoi Aly et Moussa ? C'est vrai, pourquoi pas la vingtaine d'autres enfermés au CRA de Sète ? C'est normal de poser la question et c'est aussi normal qu'on y réponde. parce qu'en nous battant pour Aly et Moussa, c'est tous nos frères migrants qu'on veut protéger d'un État malveillant. Et parce qu'on ne va pas cesser tant qu'il y aura un seul homme détenu derrière les barbelés du CRA de Sète.

Aly et Moussa, on les a rencontrés au parloir du centre de rétention. Souvent et on a beaucoup parlé avec eux, on connaît leur histoire, les prénoms des frères qui sont restés en Côte d'Ivoire. On les aime. On veut vivre avec eux dans ce pays qu'ils ont choisi. C'est simple et c'est humain. Plus fort que les prisons parce que les prisons pour étrangers, on les abattra et on les fermera l'une après l'autre. Hauts-lieux du malheur et du racisme dans la Ve République, comme les goulags avaient pu l'être dans l'ancienne URSS.

Et demain, si nous sommes des milliers à nous battre, solidaires des exilés qui sont devenus les nouveaux parias d'un monde incapable d'accueil, nous serons fiers de vivre dans un pays qui n'enfermera plus ses étrangers derrière les murs des centres administratifs de la honte. Nous serons fiers d'avoir participé à la prise du CRA de Sète, dignes héritiers des émeutiers de la Bastille. Nous nous battrons et ça commence demain quai Maillol, devant le CRA de Sète. À midi.
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Pétition pour libérer Moussa Kanté : 
https://www.change.org/p/pierre-pou%C3%ABssel-lib%C3%A9rez-…

ExCRAdition générale !  : https://www.facebook.com/excradition/

© Photo de Julie-Anne Marmet prise lors d'affichages sur les murs du CRA de Sète, le 3 juin 2018, pendant la marche des États Généraux de la Migration.

Tieri Briet

Né en 1964 dans une cité de Savigny-sur-Orge où il a grandi à l'ombre d'une piscine municipale, Tieri Briet vit aujourd'hui au fond de la Camargue, avec une famille rom de Roumanie dont il partage la vie et le travail. Il a longtemps été peintre avant d'exercer divers métiers d'intermittent dans le cinéma et de fonder une petite maison d'édition de livres pour enfants. Devenu voyageur-ferrailleur pour pouvoir écrire à plein temps, il est aussi l'auteur d'un récit sur les sans-papiers à travers les frontières, « Primitifs en position d'entraver », aux éditions de l'Amourier, de livres pour enfants et d'un roman où il raconte la vie de Musine Kokalari, une écrivaine incarcérée à vie dans l'Albanie communiste, aux éditions du Rouergue. Il écrit pour la Revue des ressources, Ballast et L'Autre Quotidien en continuant d'explorer la Bosnie, le Kosovo et l'Albanie pour rédiger son prochain livre, « En cherchant refuge nous n'avons traversé que l'exil ».

Blog perso : Un cahier rouge