L'univers parallèle d'Isaiah Collier

La semaine passée, Jacques Denis mettait dans Libé, un coup de projecteur sur le Chicagoan Mike Reed dont le dernier projet The Separatist Party offrait “neuf titres mêlant spoken word et jazz sur un tapis de boucles minimalistes, dont les seules limites sont sans doute les références auxquelles ils font songer”. Aujourd’hui, toujours de la ville des vents, on s’arrête sur Parallel Universe d’Isaiah Collier. Quelques détails suivent…

L'innovateur, multi-instrumentiste et compositeur basé à Chicago, Isaiah Collier, ouvre de nouvelles dimensions dans le continuum du jazz, en tentant l’univers parallèle. Ayant déjà joué avec un large éventail de musiciens tels que Chance The Rapper, Waddada Leo Smith, la sommité du jazz de Chicago Angel Bat Dawid et son propre groupe The Chosen Few, le travail de Collier en tant que chef d'orchestre dément le nombre de ses années. La probable réélection du crétin Trump n’y étant sans doute pas pour rien.

En recherchant dans le passé, du côté des géants de la musique noire (Sun Ra, Ras G, J Dilla, Fela Kuti, Miles Davis, Gil Scott-Heron, Whitney Huston, Aaliyah and Frankie Knuckles) , de quoi actualiser le propos, il s’adonne à une session direct to disc, à savoir du live enregistré tel quel, sans retouche de prod après coup. On va dire que la pari est très réussi et remet en perspective, les facilités offertes en studio pour retrouver d’autres sensations. Live jazz isn’t it ?

« L’enregistrement direct sur disque m’a donné une vraie occasion de découvrir ce à quoi nos prédécesseurs musicaux étaient confrontés il y a près de cent ans » Isaiah Collier

Ainsi, Parallel Universe est une créature différente, le dernier enregistrement du label Night Dreamer. Musicalement, cela mêle des saveurs funk et gospel dans un mélange animé par des parties vocales (de Jimetta Rose et Collier) et des riffs accrocheurs autant que du sax renversant, bien qu'il y ait de nombreux lamento post-bop, en particulier sur Village Song qui reviennent à la source ancestrale, passant des chants yoruba à une mélodie enjouée menée par la flûte de Collier, tandis que The Lean et Open the Door puisent dans les saveurs soul des années 70 avec le piano Rhodes et la guitare wah-wah. La paix, l'amour et la liberté sont beaucoup évoqués, mais de manière dynamique. Comme un contre-feu au désastre politique à venir . On lui laisse le mot de la fin :

"Donnez-moi ce sentiment qui me donne l'impression d'être vivant". « Les gens savent quand vous prenez des risques. Je sais que c’est ce que tout le monde recherche.”

En attendant le premier disque de chants soufis de Rachida Dati, rien de mieux à l’horizon - pour le moment !

Jean-Pierre Simard le 16/01/2024
Isaiah Collier - Parallel Universe - Night Dreamer