Eric Manigaud dessine l'Histoire qui tache

La démarche d'Eric Manigaud est aussi conceptuelle que manuelle. Sa dernière série exposée montrait l'histoire d'une horreur nocturne, celle du massacre des Algériens en 1961 par la police. Avec un hyper réalisme travaillé au crayon et au graphite. Effrayant rendu et précision du même métal. 

Rien n’est plus émouvant que cela : le rapt de l’ombre.
Pour un dessinateur, il le sait bien, c’est renouer avec le mythe des inventions du dessin, avec Dibutade qui prend le contour du profil de l’être aimé avant qu’il ne parte à la guerre.
Mais, saisir une ombre – il ne faut pas rêver – n’est pas du côté du trait ou de la ligne ; il n’y a pas plus mouvant comme limite que l’ombre. Il faut se confronter à un exercice de prestidigitateur.
Éric Manigaud s’y acharne et y parvient à chaque fois, avec crayons et graphite. L’émiettement, dansant entre la nuit et le jour, renoue avec tous les soirs et tous les matins du monde, et ce n’est pas rien.


Alors on peut, comme lui, rester ainsi des heures dans le faisceau lumineux d’une lanterne magique à saisir l’insaisissable. C’est-à-dire : à dessiner.
Car, au delà de cette première jubilation technique, ne serait-ce point cela, dessiner : saisir l’insaisissable ou du moins le tenter ?

« J’ai longtemps gardé ce fantasme de vouloir reproduire cette matière particulière (sans parler de la lumière qui infuse, car contenue, dans de bonnes conditions de projection) que j’aime appeler la chair de l’image. »

Dans cette séparation entre Lumière et Ténèbres, premier acte créateur s’il en est, le dessinateur trouve son compte et son désir. À l’infini peut se tracer cette vibration entre l’un et l’autre, entre le clair et l’obscur et sans doute entre la vie et la mort.

Né en 1971, Éric Manigaud vit et travaille à Saint Etienne. Agrégé d’arts plastiques, il expose régulièrement son travail depuis 2003 en France (Frac Haute-Normandie, Musée d’Art moderne de Saint-Etienne, Musée Louis Senlecq ...) et à l’étranger (Saatchi Gallery à Londres, Kunstalle de Göppingen en Allemagne, Galerie d’Art Moderne de Sarajevo, Stedelijk Museum de Stad Aalst en Belgique, Academia d’Ungheria Palazzo Falconieri à Rome, Museum of Art à Mannyun-dong Seo-gu Daejeon en Corée ...). Ses oeuvres font partie de collections publiques et privées telles que la collection Saatchi au Royaume-Uni, le Frac Haute-Normandie, The SOR Rusche Collection à Oelde/Berlin, la Julian and Stephanie Grose Collection à Adélaïde ou le Landesmuseum Schloss Gottorf à Schleswig en Allemagne. 

Maxime Duchamps avec Jacquie Barral

Éric Manigaud est représenté par la Galerie Sator