Ses yeux étaient des lampes noires pour inventer la nuit, par Kenny Ozier-Lafontaine

© Michele Elia Tavaglione

© Michele Elia Tavaglione


tu rêves toujours !
tu ne peux pas le pouvoir
essayer de plus rêver
ne plus rêver rien
tu rêves toujours !
avec tes yeux
avec tes yeux
tu fais des lampes noires
tu fais de gros phares
de voitures anciennes
qui découpent dans la poussière
comme des ciseaux de gaucher
tu fais toujours
de grosses larmes de lumière
qui s' jettent
comme des folles
tout au fond d'la nuit
là où qu'i a plus rien qui remue
tu fais
des gros phares
qui crachent
des lumières
des lumières
blondes oranges
où qu'iront s'vautrer
les papillons gris
ceux là qui font tout pour crever
les premiers
tu fais
des torches de flics
lourdes et sombres
tu déchires la nuit
tu vas faire cramer tous les papillons
tu rêves toujours ...
la mer
se rendort entre tes cuisses
la mer blanche
d'écume de houle
plus rien qui bouge, l'eau qui moussait
se fige contre ta peau
les portes se ferment
tous tes yeux se referment
tu disparais
le corps, les seins, les yeux, 
les aréoles
roses et sombres
tous les
boutons de sang roses
semés sur tes seins
en rond
en rond
comme de petites planètes
identiques
les boutons de sang roses
juchés tout en haut
tout en haut
tout qui disparait
par ce que toi
tu rêves
tout qui disparait
avec toi
tout ton corps
enfoui
avalé 
les petites planètes
les lèvres de bonbon roses
ta petite peau de
petite poupée mouillée
... reste juste une grosse pluie
une averse de cerise rouge
qui s'élève comme un feu
tout en bas de tes yeux

 Kenny OZIER-LAFONTAINE


  • Kenny OZIER-LAFONTAINE (parfois Paul Poule) est poète, plasticien, vidéaste, né pour la première fois à Fort-de-France, Martinique.
  • Illustration © Michele Elia Tavaglione