La sortie de Macron à propos des GM&S est tout sauf un dérapage

"Arrêtez de foutre le bordel et cherchez du boulot". C'est en substance ce qu'Emmanuel Macron conseille aux ouvriers de GM&S, qui s'opposent à la suppression de 156 emplois dans le cadre de la reprise de l'équipementier automobile par GMD. Après une séquence de communication hyper calculée chez Whirlpool, à Amiens, visant à démontrer qu'il n'est pas que le président des riches, voilà qu'Emmanuel Macron livre une nouvelle fois le fond de sa pensée. 

Tout est révélateur dans cette phrase lâchée sur le ton de la colère lors d'une visite à l'école d'application des métiers des travaux publics à Egleton. Pour Emmanuel Macron, défendre son emploi, c'est foutre le bordel. Pourtant, les salariés de GM&S ne demandaient qu'à rencontrer le président de la République, plutôt que Benjamin Griveaux, le ministre en charge du dossier. D'autant qu'Emmanuel Macron sortait d'une rencontre avec d'autres ouvriers, ceux de l'usine Whirlpool d'Amiens, où une solution a pu être trouvée pour 277 salariés sur les 290 qu'emploient le fabricant d'appareils ménagers. Les images complaisamment relayées par l'Elysée des poignées de main et échanges complices avec les syndicalistes de la CFDT ont donc fait le tour des télés.

Mais à Egleton, au lieu des selfies dont Macron s'est fait une spécialité, les GM&S ont eu droit à un accueil autrement plus musclé, avec CRS et jets de lacrymos. Et ce conseil, donc, enregistré par les caméras de BFMTV : "Il y en a certains, au lieu de foutre le bordel, ils feraient mieux d'aller regarder s'ils ne peuvent pas avoir des postes là-bas, parce qu'il y en a qui ont les qualifications pour le faire et ce n'est pas loin de chez eux. On en parlera avec le préfet". Alain Rousset, le président-de la région Nouvelle-Aquitaine, expliquait à Emmanuel Macron que la fonderie Constellium d'Ussel peine à recruter. La phrase présidentielle a causé un véritable tollé. Pour tenter de désamorcer la polémique, l'ex journaliste du JDD et porte-parole de l’Élysée, Bruno Roger-Petit, a déploré une "citation tronquée sortie de son contexte". "Emmanuel Macron a rappelé que la recherche de solutions en matière d’emploi dépend de la responsabilité de tous les acteurs", a-t-il tweeté.

 

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Évidemment, 145 kilomètres et deux heures de trajet aller, ce n'est pas grand chose pour un homme qui se déplace en Falcon pour aller voter. Quant à chercher du travail, l'ex-banquier d'affaires Macron n'est pas franchement un expert en la matière. Sorti directement inspecteur des finances de l'ENA, il a été coopté chez Rotschild, avant d'en devenir associé-gérant, sans jamais avoir eu besoin d'envoyer le moindre CV. Dans le monde merveilleux de Macron, la main invisible du marché pourvoit à l'ajustement automatique des demandes et des propositions d'emploi, pour peu qu'on la laisse fixer librement le prix du travail, qui lui, n'est qu'un bien parmi d'autres. Et dans ce monde des équilibres de marché walrassien, il n'y a ni maisons pour lesquelles on se saigne aux quatre veines, ni enfants inscrits dans une école où ils ont leurs amis, ni voisins à qui confier les clés pour le plombier, ni syndicalistes pour négocier les primes de départ. Un monde merveilleux qui n'existe que dans les rêves de politiciens qui ont poussé hors sol et nourris au grain. La seule question qui se pose, là où on en est, c'est de savoir si Macron battra son propre record d'impopularité, puisqu'il est déjà le président le plus impopulaire au bout de quatre mois de mandat.

L'Autre Quotidien