L'AUTRE QUOTIDIEN

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à ceux qui pensent qu’il est urgent de ne rien faire contre le covid

Nous sommes du camp de ceux qui pensent aux autres. Qui pensent collectif. Qui veulent faire société. Miskine si tu n'es même pas capable de faire l'effort de mettre un masque ne serait-ce que pour le bien d'une seule personne qui ne serait pas le précieux toi ! Et honte à ceux qui osent comparer le port du masque à celui de l'étoile juive (c'est triste à mourir qu"on doive encore rappeler ça : la grande, très grande, différence, c'est que TOUT le monde ne devait pas la porter, seulement CERTAINS étaient obligés de la porter, et allaient le payer très cher) alors qu'ils sont les premiers à gober les sornettes des antisémites ("Le coronavirus, c'est un complot pédo-satanique des Rothschild - comprendre les juifs pour s'éviter un procès - et des franc-maçons pour instaurer le nouvel ordre mondial en nous inoculant de force un vaccin composé de Sida et de sperme du bouc de l'Antéchrist qui sera activé par Bill Gates et les communistes avec la 5G", on exagère à peine, tout cela se trouve facilement sur les "chaînes de réinformation" de YouTube), et en réalité s'en foutent : au fond, la plupart sont comme tout le monde, ils auraient bien aimé que toute cette histoire de Covid n'ait jamais eu lieu, ne risque pas de les ruiner, ne les empêche pas de sortir, de s'amuser, et nous aussi, on souhaite la même chose, qui ne souhaiterait pas que ce cauchemar sur la terre entière soit fini, derrière nous ?

Sauf qu'aux dernières nouvelles, c'est loin de l'être. Sauf que nous, nous ne faisons pas les autruches en nous croyant des aigles. Que nous n'avons jamais nié la réalité de l'existence du Covid ("Coronavirus is an hoax !", vous vous souvenez ?). Que nous ne cachons pas (et, en passant, ne crachons pas) sur les cadavres de bientôt un million de morts déjà (chiffre largement sous-estimé dans nombre de pays dits pauvres, ou pour des raisons politiques). Que nous admettons ne rien savoir de ce qui nous attend dans l'avenir et de ce que deviendra ce virus aux dernières nouvelles mutant à grande vitesse (apparemment, les autres sont des devins qui gagnent toujours en pariant sur Betclic ou au grattage sur Millionnaire, ils ont "des sources", ou des "intuitions", comme dit leur gourou Eve Ungerer, la reine des aigles, wow ! la prétention ! aigles qui ne sont pas comme nous de vulgaires vers de terre, ou des moutons nous jetant avec bonheur sous le couteau du boucher, nous, nous ne les avons pas, nous sommes bêtement humains, avec leurs limites).

Les abus de la police, les abus de l'état, nous les connaissons et les dénonçons depuis si longtemps, Covid ou pas, que ce n'est pas à nous que des "rebelles" qui ne demandent qu'à retourner à la magnifique et formidable vie d'avant le Covid vont apprendre ce qu'est la résistance et son prix réel. Vous voulez rouvrir votre boîte de nuit ? Super. D'autres voudraient retrouver leur oeil, leur main, sortir de prison. On ne parle pas de la même chose. Avec toutes vos prétentions de rébellion, vous rêvez de retour à la normale, de business as usual, pour vous, the show must go on. Et vous appelez les autres des moutons !

Allez hop, cachez ces morts que l'on ne saurait voir. Ne nous laissons pas abattre par quelques vieux, obèses, diabétiques, qui devaient bien de toute façon mourir. D'après les sondages, c'est clairement le point de vue d'une petite et moyenne bourgeoisie qui craint par-dessus tout le déclassement, de toute façon programmé par ma marche de l'économie. Les travailleurs, les pauvres, les gens des banlieues, massivement, et parce qu'ils sont les premiers à devoir chaque jour, pour survivre, être confrontés au risque de la maladie, n'ont aucune objection à porter le masque. Les très riches, eux, vivent de toute façon dans un autre monde, protégé, où ils risquent peu, ou rien. C'est un constat. Et nous, de notre côté, nous sommes tenus, absolument tenus, que nous le voulions ou non, sauf à tomber dans l'abîme, à veiller sur nous et les nôtres autant que nous le pouvons (qui le fera à notre place ? sur la durée ? Personne). Et nous souhaitons, terriblement, urgemment, autre chose que le retour à la normale. Qui passera de toute façon et inévitablement par un effort, collectif et assumé comme tel, pour passer du vieux monde à un nouveau.

L'individualisme, et les illusions de toute-puissance qui l'accompagnent, conséquence logique de cette société (voyez, revoyez, le "Scarface" de Brian de Palma pour le comprendre, vous en imprégner, saisir enfin que la guerre des gangs pour un point de vente n'est qu'un reflet, une imitation logique, mais à l'échelle du microbe, des rivalités entre Boeing et Airbus, les USA et Huawei, la Turquie et la Grèce pour du gaz, toutes les compagnies cotées en Bourse), l'insouciance revendiquée des anti-masques (encore une fois personne n'a envie d'en porter 24h/24h, donc le problème n'est pas là), le nombrilisme en général, l'envie de croire en un chef, en ce qui rassure dans des temps franchement pas rassurants si on les voit honnêtement, voilà le plus grand obstacle à ce que le monde aille mieux et autrement. Ne nous trompons pas de combat. Ne nous plongeons pas dans les sables (où il est vrai que c'est plus facile de plonger la tête pour oublier la réalité des problèmes auxquels nous faisons face... vous voulez par exemple, qu'on parle de la pollution et du climat ? Des 50° à Los Angeles ? Des incendies ? De la fonte des glaciers ? Covid ou pas, le problème, le drame, restent là. Et il y en a mille autres).

Affrontons la réalité telle qu'elle est. Dans son ensemble. Déjà survivons, ou aidons à survivre, ceux que nous nous aimons comme ceux que nous n'aimons pas. N'achetons rien sur les chaînes de télé-achat YouTube des gourous et charlatans qui ont toujours une solution miracle à vous vendre (ou des stages, ou une concoction, un régime, des publicités, des conférences, un nom à se faire, il y a toujours quelque chose derrière : la vie saine, la vie formidable, l'énergie terrestre, l'alignement des chakras, la guérison garantie, une place au paradis, même Donald Trump est l'envoyé de Dieu pour nous sauver, c'est dire le niveau). Gardons les pieds sur terre. Soyons humbles. Et battons-nous contre autre chose que des leurres qu'on agite sous nos yeux. Comme cette ridicule affaire du port des masques, une décision de sens commun, acceptée et appliquée sans problème par une immense majorité des français, que ceux qui parlent de “muselières” tentent d’hystériser dans un but de manipulation politique.

Christian Perrot, le 11 septembre 2020